Obligation de quitter le territoire français (OQTF) : difficulté à exécuter, nouvelles mesures

Obligation de quitter le territoire français (OQTF) : difficulté à exécuter, nouvelles mesures

Obligation de quitter le territoire français (OQTF) – pourquoi la promesse d’Emmanuel Macron d’exécuter 100 % ces obligations est intenable

En 2019, Emmanuel Macron avançait, dans une interview à l’hebdomadaire d’extrême droite Valeurs actuelles, l’objectif de porter à 100 % le taux d’exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF).

Emmanuel Macron
Emmanuel Macron

Un engagement jugé irréaliste par de nombreux commentateurs et qui revient comme un boomerang aujourd’hui, alors que le meurtre de Lola a vu la droite et l’extrême droite relancer le débat sur l’efficacité de la politique d’éloignement des étrangers en situation irrégulière. «Ce drame aurait-il pu être évité ? Oui, si l’Etat n’avait pas failli dans sa mission», a ainsi tweeté mardi le chef de file des sénateurs Les Républicains, Bruno Retailleau.

«Emmanuel Macron et Gérald Darmanin promettaient d’exécuter 100 % des OQTF. Aujourd’hui, ce n’est même pas 10 % d’entre elles qui sont exécutées», s’est fait un plaisir de tweeter Eric Zemmour.

«Nous travaillons d’arrache-pied pour faire en sorte que les expulsions» soient «suivies d’effets», mais «nous devons évidemment faire mieux», a concédé le lendemain Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, après le Conseil des ministres.

Hausse des OQTF prononcées, baisse de celles exécutées

En 2017, après l’attentat terroriste ayant coûté la vie à deux jeunes femmes à la gare Saint-Charles de Marseille (et dont l’auteur était un Tunisien en situation irrégulière qui venait d’être remis en liberté en raison d’une OTQF non signée par la préfecture), CheckNews avait expliqué les raisons de la faiblesse du taux d’exécution des obligations de quitter le territoire.

Le ratio entre les OQTF exécutées et celles prononcées s’établissait alors à 13,5 %, selon les données de la Direction centrale de la police aux frontières. Depuis, ce taux s’est dégradé, malgré l’engagement d’Emmanuel Macron en 2019.

Il est passé de 12,4 % en 2018, à 12 % en 2019, puis 6,9 % en 2020, et enfin 5,6 % pour le premier semestre 2021 (dernière donnée dont on dispose).

Certes, le Covid et la fermeture des liaisons aériennes expliquent la chute la plus récente, et le gouvernement se défend en faisant remarquer que le volume d’OQTF exécutées est au même niveau qu’à l’époque de Nicolas Sarkozy. Reste qu’il n’augmente pas.

Obligation de quitter le territoire français (OQTF)
Obligation de quitter le territoire français (OQTF)

En effet, la décision d’éloignement ou d’obligation de quitter le territoire français est prise par la préfecture, qui a pour objectif d’expulser une personne du territoire français.

notamment en cas de refus de délivrance de titre de séjour ou de séjour irrégulier en France. Si vous êtes concerné, elle vous oblige à quitter la France par vos propres moyens dans un délai de 30 jours.

Dans des situations limitées, elle peut aussi vous obliger à quitter la France sans délai. À la fin du délai de 30 jours, la personne peut être placée en centre de rétention ou assignée à résidence.

Le préfet peut aussi notifier une interdiction de retour en France (IRTF). Ensuite c’est l’administration française qui organisera le départ.

Obligation de quitter le territoire français (OQTF) : qui est concerné ?

Vous êtes concerné par l’OQTF dans un délai de 30 jours si vous êtes dans l’une des situations suivantes :

Vous êtes entré irrégulièrement en France (ou dans l’espace Schengen) et vous n’avez pas de titre de séjour.

Vous êtes entré régulièrement en France, mais vous y êtes resté au-delà de la durée de validité de votre visa (ou, si vous êtes dispensé de visa, vous êtes resté plus de 3 mois après votre entrée en France).

Votre récépissé de demande de titre de séjour ou votre autorisation provisoire de séjour n’a pas été renouvelé ou vous a été retiré.

Votre titre de séjour vous a été retiré, refusé ou n’a pas été renouvelé ou vous n’avez plus le droit de rester en France

Vous n’avez pas demandé le renouvellement de votre titre de séjour et êtes resté en France après son expiration

Vous êtes demandeur d’asile et votre demande de protection a été définitivement rejetée.

Vous représentez une menace pour l’ordre public et résidez en France depuis moins de 3 mois.

Vous travaillez sans autorisation de travail et résidez en France depuis moins de 3 mois.

À rappeler, d’autres règles s’appliquent à l’OQTF prononcée contre un étranger ressortissant d’un pays européen et les membres de sa famille vivant en France avec lui.

Toutefois, l’administration ne peut pas vous obliger à quitter la France si vous vous trouvez dans l’une des situations suivantes :

Vous êtes mineur (si vos parents font l’objet d’une telle mesure, vous pouvez être éloigné avec eux).

Vous séjournez régulièrement en France depuis plus de 20 ans.

Vous séjournez régulièrement en France depuis plus de 10 ans (sauf si vous avez été titulaire pendant toute cette période d’un titre de séjour étudiant).

Vous pouvez justifier par tous moyens résider habituellement en France depuis que vous êtes enfant (mais vous ne devez pas avoir commencé à y résider seulement à compter de votre 14e anniversaire).

Vous êtes marié depuis au moins 3 ans avec un Français (votre vie commune ne doit pas avoir cessé depuis votre mariage et votre époux doit avoir conservé la nationalité française).

Vous séjournez régulièrement en France depuis plus de 10 ans et êtes marié depuis au moins 3 ans avec un étranger vivant lui-même en France depuis au plus l’âge de 13 ans (vous ne devez pas être polygame et votre vie commune ne doit pas avoir cessé depuis votre mariage).

Vous êtes père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France (vous ne devez pas être polygame et devez contribuer à l’entretien et à l’éducation de votre enfant depuis sa naissance ou depuis au moins 2 ans),

Vous bénéficiez d’une rente d’accident du travail ou de maladie professionnelle d’un organisme français pour un taux d’incapacité permanente de minimum 20 %,

Vous résidez habituellement en France et votre état de santé nécessite des soins en France, auxquels vous ne pourriez pas accéder dans le pays de renvoi.

À noter
Si vous avez fait une demande d’asile, vous ne pouvez pas être éloigné avant la décision définitive sur votre demande. Toutefois, vous pouvez être éloigné si l’attestation de demande d’asile vous a été refusée, retirée ou n’a pas été renouvelée.

Obligation de quitter le territoire français (OQTF)
Obligation de quitter le territoire français (OQTF)

Obligation de quitter le territoire français (OQTF) : la Procédure à suivre

La décision est prise par le préfet de votre département (par le préfet de police, à Paris).

Elle vous est notifiée et doit être motivée sur le fond, c’est-à-dire exposer les fondements de la décision en droit et dans les faits.

La motivation n’est toutefois pas nécessaire en cas de refus de délivrance, de renouvellement ou de retrait de votre titre de séjour. La motivation contenue dans la décision de refus ou de retrait (qui est une décision différente de celle sur l’OQTF) suffit.

La décision fixe également le pays où vous serez renvoyé si vous ne quittez pas volontairement la France dans le délai fixé.

Vous pouvez consulter les principaux éléments de votre dossier. Renseignez-vous auprès de la préfecture pour connaître les démarches permettant l’accès au dossier.

Où s’adresser ?

Préfecture ou Sous-préfecture

Préfecture de police de Paris – Service des titres de séjour
En effet, il n’est pas possible d’effectuer les démarches dans certaines sous-préfectures. Renseignez-vous sur le site internet de votre préfecture.

Quel est le délai pour quitter la France?

Vous avez 30 jours francs, à partir de la notification de la décision, pour partir de vous-même.

Vous pouvez demander une aide au retour volontaire.

À titre exceptionnel, le préfet peut prolonger ce délai si votre situation le justifie (ancienneté de votre séjour en France, scolarisation de vos enfants, etc.). Vous devez en faire la demande auprès du préfet qui a pris la décision.

À l’inverse, ce délai peut être supprimé par le préfet si votre situation change (par exemple, si vous risquez de prendre la fuite). Dans ce cas, une nouvelle OQTF sans délai vous est directement remise (à la préfecture ou par un policier notamment à l’occasion d’une retenue pour vérification de votre droit au séjour).

Pendant le délai, le préfet peut exiger que vous vous présentiez jusqu’à 3 fois par semaine en préfecture ou au commissariat ou à la gendarmerie.

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Vous devez informer l’administration de vos démarches en vue de votre départ. Votre passeport ou tout autre document d’identité ou de voyage peuvent vous être retirés en échange d’un récépissé. Ce récépissé vaut justification d’identité et mentionne le délai accordé pour votre départ.

Le recours contre l’obligation de quitter le territoire français (OQTF)

Pour contester l’OQTF, il faut déposer une demande auprès du tribunal administratif compétent pour la préfecture qui a pris la décision d’éloignement. Ce recours est suspensif.

Le tribunal administratif dispose d’un délai qui varie en fonction du motif de l’OQTF : de 6 semaines, de 3 mois ou de 96 heures.

Peu appliqué car peu applicable

Le souci réside dans le fait que pour réaliser une OQTF il ne faut pas que le pays soit dangereux ou instable et surtout il faut l’obtenir l’accord du pays d’accueillir son ressortissant.

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En effet, il faut obtenir du pays d’origine un laissez-passer consulaire, soit la reconnaissance par l’Etat de destination d’accueillir son ressortissant.

Et certains pays refusent de les délivrer, notamment les pays du Magreb.

« Rendre leur vie impossible »

Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur avait déclaré fin octobre vouloir rendre « impossible » la vie des étrangers soumis à une obligation de quitter le territoire.

Il avait déploré un « droit trop complexe pour expulser un étranger en situation irrégulière, avec jusqu’à 12 recours administratifs et judiciaires » et souhaite ainsi fluidifier la procédure.

Gérald Darmanin
Gérald Darmanin

Un projet de loi sur l’asile et l’immigration sera déposé dès début 2023.

Deux nouvelles mesures depuis quelques semaines
Dès qu’une personne est visée par une OQTF elle est dorénavant inscrite sur le fichier des personnes recherchées pour faciliter le travail de la police, comme le rapporte BFM.

De plus, le ministre de l’Intérieur a demandé aux préfets de faire un suivi des OQTF pour vérifier de manière plus systématique que la personne a bien quitté le pays au bout des trente jours alloués.

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